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Edito vidéo : Mars 25
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Accueillir, la diversité n’est jamais une démarche facile et pourtant l’enjeu est vital. Il faut se laisser enseigner par la nature qui nous entoure et nous structure de l’intérieur : partout où on la laisse vivre, elle foisonne, elle déborde, elle invente, elle crée du neuf. Le vivant est par essence d’une diversité débordante. Et pourtant l’humain ne cesse de vouloir la maîtriser, l’encadrer, lui poser des limites. Les frontières, les visas, les barrières, les murs, les obstacles sont érigés un peu partout. Il semblerait que l’humain ne supporte pas la diversité. Sa présence, même dans un écosystème le perturbe, l’assèche, l’appauvrit. Au comportement de prédateur s’ajoute sa peur de l’autre, du différent, de l’inconnu. L’humain ne peut pas s’empêcher d’exclure. Et pour cela il a inventé des notions qui lui sont propres et auxquelles il s’identifie : l’identité, la nation, la propriété, le moi, l’immigration.
Cette peur de la diversité se retrouve jusque dans l’Église. Certes, tout le monde affirme haut et fort sa volonté d’accueil et d’ouverture, sans même parler d’évangélisation, qui veut partager l’Évangile avec celles et ceux qui ne connaissent pas encore. Mais implicitement on attend des nouveaux venus qu’ils s’intègrent et se fondent dans la masse (mais faut-il encore parler de masse ?)
Un peu partout on voit le visage de nos Églises changer. De moins en moins de têtes blanches et de plus en plus de familles venues des 4 coins de la planète, avec un peu partout la même sensation mitigée … « Je ne reconnais plus mon église » « L’église devient évangélique » « Je n’aime pas leur musique » « Les églises en France sont froides et mortes » « Leurs cultes sont vides » J’ai même entendu utiliser l’expression de « grand remplacement »…
Ce sont des phrases que l’on entend ici ou là, mêlées parfois d’un sentiment de culpabilité, tant il est vrai que cette part d’ombre qui sommeille en nous ne s’avoue pas facilement… Notre Eglise devient de plus en plus multiculturelle, et l’Église Universelle ne s’éprouve plus seulement dans le lointain par le financement du service protestant de mission DEFAP. Désormais elle s’expérimente au quotidien. Il arrive souvent que cela soit vécu dans la joie et la gratitude d’une vitalité retrouvée. Mais il arrive également régulièrement que l’expérience soit vécue douloureusement non seulement du côté des nouveaux venus mais aussi par celles et ceux qui sont là depuis toujours. D’un côté on parle de « silencement » pour décrire l’impression que, non seulement personne ne nous donne la parole, mais aussi et surtout qu’on parle à notre place. De l’autre, on rêve de préserver l’identité luthérienne ou réformée, cet héritage que nous avons reçu de nos pères. De part et d’autre on ressent de la frustration devant ce qui nous semble être des préjugés, du non-dit, voire de l’hypocrisie.
Le Conseil régional de notre Église protestante unie en région parisienne, en résonance avec les décisions de nos synodes régionaux et nationaux, a décidé de saisir cette question à bras-le-corps. Dans les mois prochains vous serez sans doute amenés à croiser la route de Rodolphe GOZEGBA. Docteur en théologie centrafricain qui a fait ses études à l’institut protestant de théologie de Paris, spécialiste du dialogue des cultures et des religions, vient d’accepter la mission d’accompagner nos paroisses à regarder en face cette question de l’interculturalité.
Donner la parole aux uns et aux autres, favoriser l’écoute mutuelle, affronter les résistances aux changements, donner des outils pratiques et faciles à utiliser, font la première partie de sa mission.
Il lui est également demandé de nous aider à analyser et à comprendre spirituellement et théologiquement ce qui se passe quand l’Église assume sa diversité. L’enjeu, on le comprend, consiste à nous aider à prendre conscience de la profondeur spirituelle de cette question de la diversité. Rapatrier cette question en nous-mêmes demande un effort pour accueillir dans notre cœur la diversité des ressentis et des expériences vécues : la peur, la joie, la colère, l’amour, la rencontre, l’exclusion, etc. Ce chemin d’apprentissage de la diversité se joue d’abord en nous.
Enfin, 3e volet de sa mission, il proposera aux pasteurs venus d’autres églises, d’autres horizons culturels et d’autres continents de partager les joies et les difficultés de leur mission au service de notre église.
Alors sans doute serons-nous devenus capables de célébrer la diversité comme un cadeau voulu par Dieu, au service de la vie et de l’amour. Peut-être pourrions-nous organiser un nouveau festival « Terre d’espérance » qui serait une véritable fête de l’Église Universelle et qui célèbre l’interculturalité en nous offrant l’opportunité de fêter ensemble la richesse de la diversité. Sans doute pourrons-nous alors redécouvrir la beauté de la création et honorer la vocation de l’humain, créé à l’image de Dieu pour s’émerveiller avec lui : « Dieu vit alors tout ce qu’il avait fait : vraiment c’était très bon ! » (Genèse 1,31)
Pasteur Samuel AMEDRO