Un anniversaire pour se souvenir des grandes étapes du projet avec les artisans, professionnels et bénévoles, qui y ont contribué.
Le temple, un patrimoine protestant
Joël Chaille, président du Conseil presbytéral de l’époque, se souvient du choc en 1999 à l’annonce par la municipalité de la construction d’une ZAC qui allait bouleverser la vie paisible de la paroisse. Quel serait son avenir ? Une disparition ou une transformation ?
Dès lors, la vente du temple historique (voir encadré) s’impose comme la seule solution viable. Un crève-cœur pour beaucoup d’abandonner ce lieu, témoin des moments forts de leur existence : baptêmes, mariages, obsèques. Comment accepter cette séparation ? Mais l’espérance guidera ce projet jusqu’au bout.
De la ténacité, du courage et de l’engagement, il en faudra aux personnes responsables du projet, car un conseil presbytéral n’est pas spécialisé en construction immobilière de cette ampleur. Pasteur, président du conseil, architecte, chef de travaux, élus et paroissiens, tous seront mis à contribution. La vente de l’ancien temple ne suffira pas, encore faudra-t-il trouver un autre terrain pour reconstruire. Le terrain ne suffira pas, encore faudra-t-il les moyens. La subvention de la région ne suffira pas, et c’est finalement la générosité, les dons de toutes et tous qui viendront compléter le budget.
C’était un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître… celui de l’Église réformée, du passage à l’euro. Des anecdotes jalonnent l’histoire de ce jeune temple, comme le premier projet de l’architecte qui ressemblait à un temple grec, ou les escaliers qui n’étaient pas bien placés…
Construire un temple, c’est une aventure humaine où les besoins rencontrent les contraintes, où chacun doit reconnaître ses limites et celles de l’autre, où les conflits doivent s’effacer devant la valeur de l’objectif ; il faut finir, aboutir pour ouvrir ce nouveau temple. Le temple est l’œuvre de toute la communauté chrétienne.
« La Communauté est au centre »
Zoltan Zalay, pasteur à Montrouge de 1992 à 2005, écrit : « L’essence de la tradition protestante réformée est bien autre chose que la seule nudité des temples : convoquée par la Parole et conduite par la foi, c’est la communauté (l’Église) qui est constituée comme le cœur – ou l’instrument – de la présence et de l’action du Christ. » Le temple sera donc simple et sobre. De forme carrée (10 m x 10 m), celui de Montrouge est centré autour de la chaire et de la table de communion. La communauté est au centre, on se voit. Les membres de l’Église sont, les uns pour les autres, main tendue et visage du Seigneur : dans l’accueil, l’écoute et le témoignage, la prière, le chant. Toutefois, des banquettes le long des murs accueillent ceux qui se sentent mieux en périphérie qu’au milieu de tous.
Le temple aujourd’hui
« Nous avons fait le bon choix », affirme Joël Chaille vingt ans après, « même si nous n’avons pas pu reprendre la croix de l’ancien temple. Il a fallu faire des concessions et les expliquer. »
Étienne Languereau, maire de Montrouge, a tenu à être présent pour cet anniversaire, témoignant ainsi de son attachement à une laïcité apaisée. Il a rappelé que « si le temple a vu le jour, c’est parce que la ville était soucieuse que chacun, quelle que soit sa conviction religieuse, puisse trouver sa place et dialoguer dans la ville. »
Montrouge continue d’évoluer et de se transformer. L’ancien temple s’appelle désormais La Distillerie, et une fresque a été inaugurée le week-end du 21 septembre.
Samuel Amédro, président du Conseil régional de l’EPUdF région parisienne, a remercié tous les ouvriers qui sont porteurs d’espérance, ainsi que tous les acteurs de sa construction. « Qu’il s’agisse de casser des murs pour construire une nouvelle maison, ou tout autre projet, si on met tous ces efforts-là, c’est parce que nous sommes porteurs d’une espérance de quelque chose de plus grand que nous et que nous recevons un appel à plus grand que nous. »
Il a également rappelé que le temple est « un lieu en dehors du temps de tous les jours, où l’on veut être en contact avec l’éternité. Dans le temple, on peut s’arrêter, se mettre en pause et se tenir devant Dieu. Ce lieu n’est pas un lieu séculier, c’est un lieu d’accès au divin. Il y a un lieu où l’on parle de résurrection et c’est ce lieu. Dans ce lieu, on entend la parole qu’on n’entend pas ailleurs, qu’on ne peut pas entendre ailleurs que dans les églises, les temples, les mosquées et les synagogues. L’État est laïque et doit le rester, mais la société n’a pas à être laïque. Nous sommes une Église et nous sommes membres de la société. Oui, il y a du divin possible, oui, il y a du vrai possible, oui, il y a de la fraternité possible, oui, il y a de l’humain, et ensemble, nous pouvons construire une vie plus grande que les étroitesses auxquelles nous sommes confrontés aujourd’hui. De cela, nous sommes témoins et nous sommes fiers. »
Joël Chaille a émis quelques vœux pour les prochaines années : que cette paroisse reste un lieu ouvert à tous, dans le cadre de la théologie libérale, que la liberté individuelle reste un rempart face aux mouvements sectaires, que la paroisse garde toute sa place et que les relations avec la ville restent aussi bonnes qu’elles l’ont été jusqu’ici, qu’elles se poursuivent dans le cadre d’une laïcité apaisée. Il donne rendez-vous à tous dans 20 ans !
120 ans d'Histoire
Tout a commencé à la fin du XIXe siècle. Au départ, il y avait la paroisse de Plaisance, et aucune autre paroisse au sud de Paris. Les usines nouvellement construites provoquèrent une migration de population que le pasteur Doumergue se chargea d’évangéliser, jusqu’à ce que la paroisse de Plaisance soit trop étroite pour accueillir de nouveaux paroissiens. Un pasteur a alors été nommé pour épauler le pasteur en place, puis en 1898, le Conseil presbytéral de Plaisance a donné son accord pour réfléchir à l’installation d’un lieu de culte. En 1902, la collecte de dons a commencé pour construire le temple au 27 rue de Fontenay (ancien nom de la rue Maurice Arnoux), inauguré en 1904.
Ce n’est qu’en 1912, s’appuyant sur la loi de 1905, que le pasteur Doumergue crée une association cultuelle, qui reste cependant encore rattachée à la paroisse de Plaisance.
En 1913, une assemblée générale sépare les deux associations. Il y aura désormais intra-muros la paroisse de Plaisance et extra-muros la paroisse de Montrouge. Cette dernière couvrait alors les communes de Clamart et Malakoff jusque dans les années 1920.
La Première Guerre mondiale a été un cataclysme pour la paroisse. Les archives témoignent de la fin tragique du pasteur et d’une grande partie du Conseil presbytéral, ainsi que de nombreux paroissiens sur le front.
Après la guerre, la dynamique revenue, il a été rapidement nécessaire de créer un foyer social appelé Le Bon Accueil pour couvrir les besoins colossaux de l’après-guerre.
Ci-dessous la façade du temple de 1904, 27 rue Maurice Arnoux, et la croix qui n’a pas pu être réinstallée dans le nouveau temple.
La porte d’entrée et les vitraux porteurs de la Parole...
La journée s’est poursuivie par une visite du temple, suivie d’un moment de convivialité préparé par les bénévoles de la paroisse.
Ci-contre, Laurence Berlot, pasteure de la paroisse, qui couvre principalement les communes de Bagneux, Châtillon, Malakoff, et Fontenay-aux-Roses.
L’Eglise Protestante Unie de Montrouge
64 rue Maurice Arnoux 92120 Montrouge
Métro 4 : Mairie de Montrouge (10 minutes à pied)
Bus 68 – Arrêt Jean Jaures
01 42 53 49 95
epudf-montrouge@protestants.org
Article et crédits photographiques : Charlotte Lemoine.