L’Assemblée générale, L’autre lieu d’une parole vivante
Pour les paroisses, l’Assemblée générale est un temps de bilan et d’envoi, au cœur de la vie locale et de ses choix. Elle parait administrative, mais c’est aussi une forme d’expression du protestantisme qui se prépare afin que le partage enrichisse l’ensemble de la communauté.
Une paroisse est avant tout une communauté vivant de la Parole, mais c’est aussi une association cultuelle relevant de la loi de 1905. Cette dimension plus administrative parait parfois moins attractive ; elle est cependant au centre de la vie locale, elle en traduit les engagements et la foi.
L’Assemblée générale au cœur de l’Eglise
Ce qui fonde le chrétien est l’intime conviction de la présence de Dieu, dévoilée dans la Bible et accomplie lors de la mort et de la résurrection de Jésus, reconnu comme le Christ de Dieu. Autrement dit, être protestant relève avant tout d’une relation personnelle avec son Dieu. L’Eglise se définit alors comme un événement, le rassemblement des croyants sous l’action de l’Esprit.
Une fois énoncée cette base théologique, encore faut-il que la communauté locale s’organise un peu. C’est le rôle dévolu à l’Assemblée générale ; car en protestantisme, le centre de la vie locale se structure au niveau de l’association cultuelle. Cette assemblée a les pleins pouvoirs pour décider de tout, en réponse à la conviction des Réformateurs que le sacerdoce des croyants est universel.
Une ellipse à double foyer
Autant la Parole anime le chrétien et fonde sa relation à Dieu à titre personnel, autant la paroisse est guidée par une autre logique qui fait intervenir la notion de communauté. Car la parole qui fera vivre un être humain n’est pas forcément la même que celle qui animera son voisin, alors qu’ils sont pourtant frères. L’Eglise locale est donc soumise à une double règle : permettre à la Parole de grandir en chacun, et permettre à la communauté de vivre ensemble cette Parole.
En mathématiques, cela prend la forme d’une ellipse à double foyer, là où un médecin évoquera deux organes centraux, le cœur et les poumons. Comme les poumons inspirent l’air extérieur et irriguent le corps d’oxygène, la vie chrétienne individuelle se nourrit de la Parole et la traduit en engagements concrets, en prière ou en méditation. Le cœur a plutôt la fonction de faire circuler le sang, nourrissant ainsi chaque cellule en maintenant le flux de la vie dans toutes les parties du corps ; on est ici plus proche de la notion d’Eglise et du rôle de son Assemblée générale.
Comment cela se passe
Concrètement, le fonctionnement d’une Assemblée générale d’Eglise est proche de celle d’une association de loi 1901. Chaque paroissien se fait inscrire sur une liste électorale avant le 31 décembre, par une demande écrite. Le Conseil presbytéral examine les candidatures selon quelques critères simples : la personne est-elle identifiée, protestante, participe-t-elle à la vie de l’Eglise, est-elle déjà inscrite dans une autre paroisse ? Il validera la liste électorale chaque d’année, cette liste servant de base aux convocations à l’AG.
L’Eglise est bien sûr plus large que les seuls membres d’une liste, mais l’Assemblée générale étant le lieu de gouvernement de l’Eglise, il importe que les participants soient identifiés plus formellement pour pouvoir prendre la parole et voter. Avant même de choisir des projets de vie ou de regarder l’avenir de la paroisse, l’AG a en effet la mission « d’entendre un rapport sur l’année écoulée, d’approuver les actes et les prévisions de gestion et d’administration, de voter les comptes et le budget… » (Statuts-types des paroisses, art. 4), ce qui implique une responsabilité réelle.
Election et collégialité
Le rôle de l’Assemblée est également l’élection des conseillers presbytéraux, qui porteront la communauté dans ses décisions durant une période de quatre ans. Même si rien n’empêche une candidature spontanée, le ministère de Conseiller implique un discernement, ce qui demande du temps et explique qu’une liste de noms soit proposée à la validation de la communauté rassemblée en AG.
Les convocations étant envoyées aux membres une dizaine de jours avant la tenue de la séance, chacun peut donc se préparer pour cette assemblée qui se tient en général avant ou après le culte dominical aux mois de mars ou avril.
On notera par ailleurs que le ‘rapport sur l’année écoulée’ n’est ni le rapport du président ni un rapport d’activité à voter. Cela s’explique simplement par le caractère collégial du Conseil presbytéral et par l’appartenance de l’association à l’Union nationale (l’Eglise protestante unie de France). Une partie des décisions résulte donc de ce que votent les synodes régional ou national, le reste étant une série d’actes collégialement validés, pour lesquels la fonction de présidence n’est pas celle d’une direction, comme en entreprise. D’une certaine manière, si l’on conçoit que l’Eglise se place sous la direction de l’Esprit, on ne vote pas l’inspiration divine. Les actes concrets de gestion ainsi que les projets de vie sont en revanche du domaine et de la responsabilité de l’Assemblée générale.
Ce caractère formel de l’organisation peut paraitre bizarre dans une Eglise où l’essentiel semble se vivre dans les célébrations de la Parole, les études bibliques et la catéchèse, c’est-à-dire l’activité réelle et quotidienne. Il est néanmoins ce qui permet d’orienter les actions de la paroisse et d’en rendre compte. Cet exercice est donc vital pour la communauté, ses choix, sa vie.
Hermann Grosswiller